Linjett & le Linjett 33

Comme je l’ai évoqué précédemment, nos recherches d’un nouveau bateau nous ont progressivement orientés vers le marché scandinave. C’est alors que, par le plus grand des hasards, en consultant une annonce, nous avons découvert Linjett. Pour être honnête, j’en avais entendu parler une fois dans la presse spécialisée au moment où le Linjett 39 a été élu « European Yacht of the Year » en 2023 dans sa catégorie.

Pour revenir à l’annonce qui a retenu toute notre attention, il s’agissait d’un Linjett 33 de 1995. Avant de vous en parler plus en détail, je souhaiterais évoquer brièvement le chantier Linjett et son histoire. Linjett est un chantier naval qui a été fondé et est géré depuis plus de 140 ans par la famille Gustafsson. Les locaux principaux se situent à Rosättra, dans le nord de l’archipel de Stockholm. C’est précisément là que nous nous sommes rendus pour visiter notre futur bateau. Nous y avons été accueilli par Fredrik, responsable de la section courtage et du service après-vente.

Avant de monter à bord, nous avons eu l’occasion visiter rapidement les différents locaux du chantier. Pour être tout à fait honnête, c’est la première fois que nous avions l’occasion de rentrer réellement dans un chantier de construction navale. La première chose qui nous a séduite est l’atmosphère particulièrement calme qui y régnait et la propreté irréprochable des lieux. Nous avons pu y observer le travail soigné d’artisans manifestement hyperqualifiés. Si nous devions résumer notre impression en quelques mots, nous pourrions dire que Linjett est un savant mélange de savoir faire traditionnel et de technologie de pointe. L’ensemble des éléments des bateaux sont conçus, fabriqués et assemblés à Rosättra à l’exception des coques qui sont fabriquées par le chantier mais sur un autre site situé à quelques kilomètres. Pour ceux qui souhaiteraient en savoir davantage sur ce chantier, nous renvoyons aux excellents articles du blog no-frills-sailing.com dont l’auteur a effectué une visite détaillée du chantier. https://no-frills-sailing.com/linjett-yachts-rosaettra-shipyard-visit/

Après cette visite et un bon café dans l’impressionnante cafétéria dont la vue sur le plan d’eau est imprenable, nous sommes montés à bord de Pancetta. Accompagné de Fredrik, toujours disponible pour répondre de façon précise et professionnelle à nos questions, nous avons procédé à l’inspection du bateau en suivant notre checklist. Il faut être honnête, suivre la checklist à laquelle j’avais réfléchi pendant de nombreuses heures n’a pas été simple tant le charme du lieu et du bateau ainsi que la bienveillance de Fredrik opéraient sur nous.

Nous avons donc procédé successivement à l’inspection du gréement et des voiles, du pont et de l’accastillage, de la baille à mouillage, du cockpit, de la cale moteur, des fonds de cale et des boulons de quille, du pied de mat, des installations électriques et électroniques, de la plomberie et des aménagements intérieurs. Notre travail a été grandement facilité par le fait que le chantier, qui a ici aussi joué le rôle d’agent de courtage, procède à sa propre inspection, fournit une liste des points à problèmes ainsi qu’une garantie de 3 ans sur le bateau. Nous n’avons détecté aucun vice et le rapport d’inspection faisait état de détails à corriger et d’ajustements à effectuer ça et là comme toujours sur un bateau.

Là où notre surprise fût la plus grande est sans doute lorsque Fredrik nous a invité à l’accompagner dans la cafétéria pour un lunch Suédois qu’il avait pris soins d’apporter pour nous avant de nous proposer un essai en mer. Nous larguons les amarres en début d’après midi pour une sortie d’environ deux heures à toutes les allures. Le moteur dont nous ignorons complètement le nombre d’heures puisqu’il n’est pas équipé d’horamètre démarre facilement à froid. Nous quittons gentiment le port privé de Rosättra au moteur par vent de sud-ouest 2-3 beauforts. Après nous être quelques peu éloignés, nous établissons les voiles. Même si Fredrik dirige toutes les manœuvres, on sent que le bateau, qui pèse deux fois moins lourd, est plus réactif que Lady Mi. La barre franche est douce et le bateau particulièrement stable sous voiles. Les prises de ris automatiques sont un jeu d’enfant. Enfin, la direction du vent et l’étroitesse des chenaux dans l’archipel, en nous condamnant à une multitude de virements de bord, nous font découvrir que le foc autovireur est un vrai régal.

Trajet approximativement réalisé lors de l’essai en mer

Vous l’aurez compris, ce bateau est un véritable coup de cœur. Nous ne prenons pas le temps de prendre de photos ou de réaliser de vidéos sous voiles. Il faudra attendre cet été. Nous rentrons au port et profitons d’une heure supplémentaire à bord, sans Fredrik, de façon à pouvoir alimenter nos réflexions. En fin d’après-midi, nous le saluons après avoir négocié un traditionnel délais de réflexion. Quelques jours plus tard, nous confirmons l’achat par email et procédons aux formalités administratives. Pancetta sera re-baptisé EphéMER.

Linjett nous a séduit au delà de la qualité de fabrication et du comportement sous voile du bateau. En effet, acheter un Linjett, c’est faire partie d’une famille. Le chantier, je l’ai évoqué, possède sont propre port où seuls les Linjetts peuvent s’amarrer. Il a aussi son propre système d’hivernage, à nouveau réservé aux Linjetts. Nous ne pensons pas qu’il s’agisse ici d’une volonté absolue d’exclusivité mais plutôt d’un souci de limiter la taille de l’infrastructure de manière à pouvoir maintenir le standard de qualité auquel le chantier est attaché. Enfin, dans la mesure où l’ensemble des bateaux et de leurs pièces sont fabriqués au chantier, il est aussi possible d’y faire faire tous les travaux de réparation et d’entretien. Cette situation semble idéale pour nous. En effet, compte tenu des 1600 kms qui nous séparent de Stockholm, il paraît illusoire d’effectuer par nous même des travaux importants sur le bateau. Nous nous limiterons donc, cette fois ci, aux petites réparations et travaux d’entretien qui émaillent toutes les croisières en voilier. Je terminerai en disant qu’à mon sens, permettre d’entretenir et de réparer des bateaux de tous âges avec ce niveau de qualité est probablement la meilleure façon de prolonger leur vie le plus possible et donc s’inscrit dans une démarche environnementalement saine.