Dès avant notre arrivée à Brest, nous avions pris la décision qu’il ne s’agirait que d’une étape courte. En effet, nous souhaitons rester en mode voyage et non convoyage le plus longtemps possible. Nous prenons donc la décision de traverser la manche dès que possible et de rentrer en Belgique via la côte sud de l’Angleterre. Il semble que l’on puisse trouver du vent le mardi 27 juin pour traverser la manche, alors la décision est prise. Nous planifions le départ pour 17 heures afin de bénéficier du courant favorable dans le goulet de Brest et le chenal du Four. Le bateau est rapidement re-préparé et avitaillé. Nous passons ensuite à une étape un peu plus difficile, l’au revoir à Picasso et à La Perla. Ils organisent pour nous un petit goûter sur le ponton. Ces moments sont toujours difficiles et heureusement que le courant veille sur l’horaire afin que les adieux ne s’éternisent pas.
Nous nous arrêtons ponton « gasoil » pour faire le plein avant de partir sur l’Angleterre. En passant le pistolet de la pompe depuis le ponton jusqu’au bateau, je glisse malencontreusement sur un endroit où il devait y avoir du gasoil. Mon côté droit s’écrase sur le bord du ponton alors que je glisse dans l’eau. Philippe et Cédric qui sont heureusement présents me rattrapent. La douleur est si intense que je peux à peine respirer durant les premières minutes. Je refuse de me laisser abattre et encore moins d’annuler notre départ. Anne-Lise me donne deux anti-douleurs et termine le plein. Nous prenons le départ comme prévu.
Nous commençons par tirer des bords pour sortir du goulet de Brest avec le vent de face. Chaque manœuvre réveille la douleur mais elle me paraît supportable. Une fois sorti du goulet, le vent est malheureusement aux abonnés absents. Nous allumons le moteur car nous savons qu’il faut impérativement avancer et sortir du chenal du Four avant la bascule de courant. Les prévisions annoncent le retour du vent dès la sortie du chenal du Four. Malheureusement, Éole se fait attendre. Nous jouons en fait au chat et à la souris toute le nuit avec le vent qui ne s’établit franchement qu’en début de matinée. Nous pouvons alors envoyer le spi et avancer à très bonne vitesse vers notre première destination outre manche, Fowey. Nous entrons dans l’embouchure vers 16h00 après une transmanche un peu désastreuse puisque nous totalisons presque 12 heures de moteur, ce qui n’est pas franchement le genre de la maison. Heureusement, la récompense est de taille. La rivière semble un havre de paix entourée de deux petits villages aux maisons colorées. Il y a par contre peu de places disponibles. Nous nous amarrons sur une bouée assez haut sur la rivière. Nous sommes fatigués mais heureux d’avoir traversé la manche et de retrouver l’ambiance des côtes britanniques. Les douleurs se réveillent avec le refroidissement de l’organisme. Je crains avoir une ou deux fractures de côte. Même si cela n’est pas très raisonnable, je décide de ne pas en parler à la faculté et de continuer le traitement antalgique. Je n’ai nullement envie de me voir interdire de naviguer.





Durant notre séjour à Fowey, le temps s’arrête quelque peu. Nous profitons de ballades dans la petite ville et le long du littoral, nous renouons avec les produits et la gastronomie anglaise. Nous restons au total quatre nuits dans l’embouchure de cette sympathique rivière.