La plupart des blogueurs commencent leurs articles sur le mal de mer par quelques précautions d’usage (qu’il s’agit de leur expérience personnelle, qu’ils ne sont ni médecins, ni spécialistes du domaine, et que leurs propos doivent être interprétés avec prudence). Je n’ai pas ce privilège puisque je suis censée savoir. Par contre, malgré tout ce que la science aurait pu m’apporter, tous ceux qui ont déjà voyagé avec moi savent qu’il vaut mieux éviter d’être à mes côtés, tant je suis sensible au mal des transports.
Le mal de mer, mal des transports ou cinétose est bien connu des marins en général et de l’équipage de Lady Mi en particulier. C’est un ensemble complexe de symptômes qui apparaissent de manière plus ou moins marquée lorsqu’il y a conflit entre différentes informations sensorielles (visuelles, proprioceptives, vestibulaires principalement).1 La manifestation la plus visible est la nausée, connue depuis que l’humain navigue (d’ailleurs, le mot « nausée » lui-même dérive de la racine grecque ναυϭ, bateau, qui a également donné « nautique »).2 En réalité, les manifestations peuvent être très diverses et varier d’une personne à l’autre, et d’un moment à l’autre. Au niveau cérébral, les relations étroites entre les afférences somato-sensorielles, le cortex temporo-pariétal, le thalamus postéro-latéral et le système nerveux autonome résultent en une myriade de signes et de symptômes.3 Il n’est donc pas si simple de l’identifier, en particulier pas au stade précoce (lorsqu’il est encore temps d’agir). Soyons honnêtes : il n’existe pas de remède miracle au mal de mer. Les femmes (en particulier enceintes), les personnes d’origine asiatique, les enfants entre 6 et 12 ans et certaines familles sont particulièrement vulnérables, mais personne n’y est immunisé : chacun y est sensible à sa manière.4 Cet article ne donnera pas de traitement miracle (nous en souffrons tous), mais donnera un ensemble de stratégies qui, lorsqu’elles agissent en même temps, parviennent à le prévenir ou du moins en alléger le ressenti. En résumé, il n’y a pas une manière de lutter contre le mal de mer, mais un ensemble de mesures permettent de le vivre, de l’accueillir comme un nouvel équipier à bord qui mérite respect et considération.

Sanger & Andrews. Front Pharmacol. 2018;9:913.

La prévention
La prévention comprend à la fois la planification du voyage, la préparation des besoins de base et les occupations à bord.
La météo
La meilleure prévention reste la sédentarité, mais dans ce cas, sont également perdus tous les bénéfices du voyage. En fonction de chacun, certaines conditions de vents, de vagues et de météo en général peuvent être plus ou moins bien supportées. On ne choisi pas l’état du ciel ni de la mer, mais on peut moduler son jour de départ et sa destination en fonction de la météo. Le vent portant, à condition qu’il soit suffisant pour gonfler les voiles et plaquer le bateau sur l’eau est, dans notre cas, mieux supporté que la navigation au près. Par contre, par temps trop calme, la navigation au près est préférée. En fonction de la force du vent, chaque équipage a une orientation plus ou moins favorable. La hauteur des vagues est une donnée importante, mais elle doit être interprétée en fonction de leur période (une houle ample et longue est préférée à des vagues courtes et raides), et de leur orientation (de dos, les vagues poussent le navire, tandis que de face, elles le freinent et pèsent sur l’estomac de l’équipage. La pire reste la houle croisée et courte). L’océan avec sa houle lente peut sembler plus léger à supporter que la mer avec sa houle rapide. Après, nous avons expérimenté le mal de mer en navigation fluviale, et même ammarés au port (oui oui, c’est possible). Dans toutes les situations, le soleil allège les symptômes et la pluie les aggrave ; ce sont donc des paramètres qui, même s’ils sont moins importants que le vent et les vagues, méritent une attention. Comme le remarque notre plus jeune équipière devant les cartes météo : « Il ne faut pas naviguer n’importe comment ».



Les besoins de base
La sagesse populaire dit qu’il faut éviter le froid, la fatigue, la frousse, la faim et la soif… facile à dire. En mer, il fait toujours plus froid qu’à terre. Selon l’orientation du vent par rapport au bateau, le froid s’aggrave (il fait plus froid au près qu’au portant, donc une simple modification de l’allure du bateau peut modifier les vêtements nécessaires). Le soleil et sa réverbération sur l’eau disparaissent la nuit, et il nous arrive d’empiler des vêtements de ski sous nos vêtements de voile la nuit (alors qu’un short suffit la journée). Avoir trop chaud n’est pas idéal non plus ; la gestion de l’habillement devient un art (sachant que chaque changement de tenue, si nécessaire soit-il, contribue aussi au mal de mer). Une marque française avait jadis vendu des vêtements « anti-mal de mer ». Elle a rapidement fait faillite (la promesse étant sans doute trop ambitieuse), mais l’idée est là : l’équipement, ni trop chaud, ni trop froid, joue un rôle important. Nous tentons de simplifier en préparant à l’avance des tenues faciles à faire et défaire. Se changer dans la houle reste un challenge, et les équipements de protection (harnais, gilets de sauvetage) n’aident pas. Avec un peu d’habitude et beaucoup de vomi, la dextérité s’améliore.
Éviter la fatigue pourrait sembler évident, sauf bien entendu lors de traversées de plusieurs jours (et nuits) où les quarts de veille s’alternent. La privation de sommeil est inévitable, mais peut être partiellement compensée par des siestes à n’importe quel moment de la journée. Une bonne dose de bienveillance est requise pour les parents qui veillent la nuit sur la navigation et imaginent des jeux en journée. Nous essayons dans la mesure du possible d’épargner l’équipier le plus fragile en lui permettant le repos à toute heure.
La peur est à la fois néfaste et salutaire, elle est celle qui nous rend prudents, mais aussi celle qui nous rend malades. Tout comme le stress et la nervosité, elle demande une gestion et une attention constante. Une bonne préparation de la navigation en amont et une bonne communication aident à prévenir la plupart des difficultés.
La faim et la soif pourraient sembler plus aisés à pallier, et pourtant… Les goûts changent en mer, et notre collation préférée à terre ne nous dit plus rien en mer. De manière paradoxale, nous n’avons plus d’appétit pour le chocolat, ni la glace, ni tout ce qui nous faisait fondre à terre. Par contre, les snacks salés ou enrichis en glutamate ont notre préférence. Chacun doit trouver sa nourriture de mer. En discutant avec des voisins de ponton, nous avions eu l’idée d’éviter les aliments riches en histamine. En effet, les anti-histaminiques sont un pilier du traitement médicamenteux du mal de mer. Il nous semblait donc intuitif d’éviter l’histamine alimentaire.5 C’était pourtant une très mauvaise idée. Il était déjà difficile de prendre la moindre nourriture avant, les évictions alimentaires ont rendu l’alimentation impossible. Nous avons vite abandonné ce régime. L’ajout de gingembre6,7 et d’huiles essentielles (citron, menthe poivrée)8 font également partie des recommandations, tout comme l’ajout de sel, de fer, de protéines et de vitamines.1 De nouveau, il y a une grande différence entre ce qui est recommandé et ce qui est littéralement ingérable en mer, en particulier pour les jeunes papilles. Ces mesures étaient impossibles à suivre. Nous avons donc simplifié le régime alimentaire au maximum : tout ce qui est possible d’avaler en mer est recommandé, tant pis pour la littérature scientifique, tant pis si la base du régime alimentaire se compose de chips au sel (à noter au passage que le goût des chips au sel est tout à fait acceptable lorsqu’ils remontent sous forme de vomi, ce qui n’est pas le cas des pistaches ni des cacahuètes). Les huiles essentielles et autres aromathérapies peuvent toujours être inhalées à défaut d’être ingérées, avec un bénéfice certes modéré.9 Notre plus jeune gastronome a baptisé « potch » un ensemble d’aliments pré-découpés, faciles à prendre aux doigts, rapidement préparés avant de prendre le large et dont nous savons qu’ils plairont à notre équipage. Il nous a fallu du temps pour le découvrir. Si j’avais su plus tôt l’attrait pour les nouilles instantanées enrichies en glutamate, ainsi que la difficulté de s’en procurer à l’étranger (la mondialisation n’est pas arrivée partout), j’en aurais certainement emporté plus au départ. La pizza est une autre valeur sûre. Comble de malchance, les symptômes de l’hypoglycémie (diminution de sucre dans le sang, conséquence des vomissements répétés et de l’absence de nutrition pendant de longues journées) ressemblent à s’y méprendre à ceux du mal de mer, nausées et vomissements inclus. Les symptômes de l’hypoglycémie ne s’arrêtent pas au port, mais c’est alors trop tard pour se rendre compte de la méprise. Nous en avons fait les frais à plusieurs reprises et y sommes maintenant particulièrement attentifs.



Si l’alimentation régulière, en petites quantités, est indispensable, l’hydratation l’est encore plus. L’environnement salin accentue la soif et la déshydratation, mais il n’est pas le seul. Les médicaments contre le mal de mer partagent cet effet secondaire ; la fatigue et la lassitude diminuent la sensation de soif ; les vomissements aggravent la déshydratation. Prévoir de l’eau douce en suffisance et aisément accessible est donc primordial.
La lutte contre l’ennui
Une fois la route choisie, et le froid, la fatigue, la frousse, la faim et la soif plus ou moins gérés, il reste… l’ennui, en particulier pour les plus jeunes membres de l’équipage. Bien entendu, lire un livre, écouter un podcast, regarder un film, dessiner ou se concentrer sur un jeu sont impossibles, sous peine de raviver le conflit entre différentes informations sensorielles et donc, le mal de transport. Certaines activités restent cependant possibles comme :
– chanter des chansons (merci aux cours de chants de mon enfance pour le répertoire, car une chanson est vite passée comparé à la durée d’une navigation : prévoir un bon chansonnier et, s’il est insuffisant, broder).
– raconter des histoires (merci aux auteurs de mon enfance pour le répertoire de contes et d’aventures ; on raconte plus lentement en mer, en s’adaptant aux bruits des vagues et au rythme de manœuvres, et nous ne pouvons donc pas confier le rôle du conteur à un podcast – ça aurait été trop facile. En cas de perte de mémoire, broder).
– écouter de la musique (choisir une playlist bien en avance, et accepter qu’elle se répète… beaucoup).
– jouer avec des dauphins (peu prévisible, mais efficace)
– réciter ses poésies, ses tables de multiplications et les verbes irréguliers en espagnol (on est sérieux ici)
– méditer, visualiser une suçette géante à la fraise et répéter son yoga (laisser le jeune équipier gérer)
Une fois bien habitués à la navigation, certains jouets sont supportés. Nous avions sous-estimé le pouvoir des Lego (si en début de navigation, ils suscitent le mal de mer à cause de la concentration qu’ils demandent, après quelques jours il est possible de les sortir. Parfois, même si le temps le permet pas de les sortir, rien que de les savoir dans l’équipet permet d’imaginer des histoires et passer le temps. Nous avions quitté la Belgique avec zéro Lego à bord (grave erreur). Compter sur un magasin de jouet ou une livraison de commande en ligne est illusoire (la mondialisation n’est pas arrivée partout). Heureusement, le marché de seconde main fonctionne partout, y compris à proximité des ports (merci Internet).



L’entraînement vestibulaire et la position
Notre projet datant de quelques années avant le départ, j’avais pris soin d’organiser des rendez-vous pour une kinésithérapie vestibulaire, pour moi-même et pour Charlotte, afin de préparer le voyage. Cet entraînement vestibulaire est certainement très utile,10,11,12 il s’agit même de la mesure non-pharmacologique la plus efficace.1 Cependant dans notre cas, le timing était mal choisi. Tout d’abord, à cause des impératifs de la vie active et de la contrainte des séances de kinésithérapie (on en sort malade), ces séances étaient probablement trop peu nombreuses et trop espacées les unes des autres pour que leur bénéfice s’additionne. Ensuite, elles étaient trop éloignées dans le temps par rapport au départ réel, or leur effet s’estompe au fil des semaines. Le bénéfice total était donc mitigé. Par contre, nous en avons retenu les principes généraux, que nous pouvons appliquer nous-mêmes en navigation pour optimaliser notre amarinage. Par exemple, la station debout pendant les navigations permet de mieux gérer les afférences proprioceptives. J’ai longtemps cherché la position idéale, qui en réalité varie en fonction du sens du vent, des vagues et de la pluie. Lorsque la navigation est au pré, se rapprocher de l’avant et porter son regard sur l’horizon devant le bateau peut aider. Lorsque la navigation est au portant, il est parfois plus utile de regarder vers le côté ou l’arrière (sauf bien entendu si les vagues viennent par l’arrière : tout un art). La station debout permet aussi de ne pas rester statique, et de pouvoir anticiper les mouvements du bateau. Tenir la barre permet également de mieux prédire les mouvements et oblige à porter son regard vers l’avant. On effectue ainsi une habituation douce et naturelle, lorsque c’est possible (lorsque le mal de mer est trop intense, c’est évidemment illusoire et il vaut mieux se coucher). Enfin, le port de lunettes de navigation (de type boarding ring) permet de compenser la stimulation visuelle.13 L’idée de ces lunettes est de donner à l’oeil les mêmes informations que l’oreille interne. Elles peuvent être un complément à l’entraînement vestibulaire mais ont leur propres limitations (elles ont une taille parfois trop larges pour les petites têtes, trop étroite pour les têtes à lunettes de vue, et comme toutes les lunettes dans la houle et les embruns, elles doivent être régulièrement nettoyées sous peine d’être contre-productives).


L’acupuncture
L’acupuncture est très répandue pour prévenir les nausées et vomissements au bloc opératoire14, en chimiothérapie15,16, pour la cinétose17 ou les nausées et vomissements en général.18,19 La stimulation du point PC6 (ou nei guan) module l’activité du système nerveux autonome20 et a été décrit dans la littérature comme un moyen de réduire les nausées avec peu d’effets secondaires, que ce soit par piqûre, massage ou pression.21 Notre expérience personnelle est plus prudente quant à la prétendue absence d’effets secondaires. En effet, après plusieurs jours de navigation, des ulcères cutanés peuvent apparaître aux points de pression. Nous optons à présent pour une stimulation plus douce mais plus pro-active, peut-être moins efficace, mais au moins sans escarres.

Les médicaments
Le traitement pharmacologique du mal de mer date du 19e siècle, et depuis lors le nombre de molécules disponibles n’a cessé d’augmenter. Les guerres mondiales du 20e siècle ont accéléré le développement de ces molécules, pour permettre aux marins et aux pilotes de meilleures performances sur l’ennemi.22 Les traitements de la cinétose ont alors été étudiés de manière très rigoureuse. De nos jours, et avec des objectifs pacifiques, l’objectif n’est pas de se doper ni de se droguer, mais de ne pas se priver d’un traitement qui a fait ses preuves. Il est imprudent de laisser le navire dirigé par un équipage malade, et la pharmacologie peut nous aider. Lorsque j’ai constitué notre pharmacie de bord, j’ai peut-être été trop exhaustive, en m’inspirant des listes publiées dans la littérature.23 Par contre, il existe des médicaments essentiels, qu’on emporte rarement en trop : ceux qui concernent les maladies chronique (si un/des membre(s) de l’équipage ont souffert dans le passé d’une maladie chronique, une rechute est probable) et ceux qui concernent le mal de mer. Les classes médicamenteuses les plus répandues contre le mal de mer sont les anti-histaminiques et les anti-cholinergiques. La combinaison de plusieurs classes médicamenteuses permet d’accroître leur efficacité en diminuant les effets secondaires. Prendre son traitement (quel qu’il soit) dès la veille du départ et à intervalle régulier permet d’en augmenter l’efficacité (notion pharmacocinétique : pour qu’un médicament soit efficace, il faut que son taux sanguin soit suffisant et stable ; en langage courant : tant qu’à prendre un médicament, autant qu’il fonctionne). Lorsqu’un traitement est nécessaire, nous tentons donc de l’initier au moins 12 heures avant le départ prévu, ce qui peut être difficile en cas de météo changeante et de départ impromptu (bref, on fait ce qu’on peut).
Les médicaments anti-cholinergiques
Les anticholinergiques, dont le plus connu est la scopolamine, sont les médicaments les plus anciens. Ils agissent au niveau des efférences vestibulaires vers le noyau vestibulaire et possiblement au niveau des intégrations centrales (antagoniste de récepteurs cholinergiques).24 Les effets secondaires sont donc communs à tous les médicaments anti-cholinergiques : sédation, sécheresse buccale, vertige, trouble visuel. Globalement, ces effets sont légers, bien tolérés et inférieurs au bénéfice. Ils ont les mêmes contr’indications que tous les médicaments anti-cholinergiques.25 La scopolamine est disponible selon différentes formulations (orale, transdermique, spray nasaux).24 En Belgique, il faut soit faire importer des patchs transdermiques de France (toutes les pharmacies belges le font), soit se procurer les patchs en France (les pharmacies françaises reconnaissent les prescriptions médicales belges), soit faire faire à son pharmacien une préparation magistrale orale contenant 0.2mg de scopolamine (1 à 3 gélules par jour). La scopolamine étant une spécialité chère et fournie uniquement en grand conditionnement, la plupart des pharmaciens seront réticents à la préparation magistrale (qui les oblige à acheter une large quantité pour en vendre quelques grammes). Une pharmacie côtière pourra plus facilement écouler son stock de scopolamine. Dans le cas contraire, une discussion honnête et compréhensive avec son pharmacien peut aider. Dans le budget du bateau, il est possible que le prix de la scopolamine semble dérisoire par rapport à son bénéfice, et nous pouvons toujours proposer à notre pharmacien de nous facturer son stock. L’avantage de la forme orale est sa modularité. L’avantage de la voie transdermique est que le médicament ne se vomit pas. Le patch transdermique s’applique 12h avant le départ pour une durée d’action de 3 jours (idéale pour les traversées). Nous n’avons pas d’expérience de la scopolamine en spray nasal, mais ce dernier pourrait combiner l’avantage de la modularité et d’éviter la voie digestive. Il est disponible en Allemagne à la dose de 0.4mg.26
Les médicaments anti-histaminiques
La découverte du bénéfice sur la cinétose des anti-histaminiques de première génération a été tout à fait fortuite, alors que ces molécules étaient étudiées dans de toutes autres indications.22 Les anti-histaminiques de première génération (dimenhydrinate, cinnarizine, meclizine, promethazine) agissent sur les récepteurs H1 et H2 du système vestibulaire et des circuits intégratifs du tronc cérébral (responsables des vomissements). Ils sont disponibles sous forme orale, intra-musculaire, suppositoire, gomme à mâcher et sublinguale.27 En Belgique, la cinnarizine commercialisée sous le nom de Stugeron est l’anti-histaminique qui convient le mieux aux membres adultes de notre équipage (25mg toutes les 6 à 12heures, à débuter la veille du départ). Les anti-histaminiques de première génération sont disponibles dans la plupart des pays sans prescription médicale.
Les formules pédiatriques
Le mal des transports varie en fonction de l’âge de l’enfant, selon le degré de maturation de l’oreille interne. Rare avant 2 ans, il s’accentue au fil des années et la plupart des enfants en souffrent entre 6 et 12 ans (avec un pic de sensibilité vers l’âge de 9-10 ans).28 Il s’atténue ensuite chez certains adolescents. Les manifestations cliniques peuvent varier (fatigue, irritabilité, ennui, sommeil excessif ou perturbé, apathie, dépression). L’entraînement vestibulaire est tout à fait possible chez l’enfant, avec les mêmes contraintes de temps que chez l’adulte. Dans le choix d’un traitement pharmacologique, plusieurs autres facteurs entrent en ligne de compte pour l’enfant, dont le goût, l’odeur et la facilité de déglutition. Ni les petits comprimés, ni les grandes gélules ne sont faciles à ingérer, et les anti-histaminiques en général ont un goût atroce pour les jeunes papilles. Le dimenhydrinate est disponible en dragées pédiatriques (commercialisées sous le nom de Dramamine aux US, au goût infect), en chewing gum au goût cerise (commercialisé sous le nom de Gavrol au Canada), ou en sirop au coût caramel (commercialisé sous le nom de Nausicalm en France). Quels que soient la forme et le goût choisi, au bout de quelques administrations, le médicament lui-même est associé au mal de mer et sa simple odeur déclenche les vomissements. Il est donc intéressant de changer régulièrement de forme de traitement (la molécule reste toujours la même). Il y a clairement des progrès à imaginer dans la gastronomie de l’anti-histaminique.
D’une manière générale, quelle que soit la maladie à traiter, les enfants et les femmes (en particulier enceintes) sont oubliés des études pharmacologiques et cliniques. Les données sur la sécurité et l’efficacité de nombreux médicaments sont étonnamment rares chez les enfants. En conséquence, les enfants reçoivent parfois des médicaments inefficaces ou des médicaments aux effets secondaires inconnus.29 Ils sont régulièrement les derniers à bénéficier des progrès de la médecine. Ce problème va bien au-delà du mal de mer, et n’épargne pas le mal de mer. L’exemple de la scopolamine l’illustre particulièrement. Bien que ce traitement ait le meilleur profil bénéfice/risque, il n’a pas été étudié chez l’enfant. L’absence de données en fait un traitement officiellement proscrit avant 10 ans et indisponible en doses pédiatriques. Priver un enfant du traitement le plus efficace et le plus sûr en raison du contexte dans lequel les études cliniques sont menées nous semble peu éthique. D’un autre côté, proposer un traitement pour lequel les données sont rares est compliqué. La littérature scientifique donne des injonctions contradictoires : la scopolamine n’est pas indiquée chez l’enfant, mais la dose recommandée est de 0.006 mg/kg, à répéter toutes les 6 à 8 heures chez l’enfant.28 En effet, les anti-cholinergiques sont largements utilisés chez l’enfant, pour un large éventail de pathologies. Selon les pays, l’usage de la scopolamine est répandue chez les enfants, avec des effets secondaires rares et transitoires, liés au surdosage inhérent à l’absence de dosage pédiatrique.30 Ce surdosage est pourtant évitable en découpant les patches31,32 (ce qui bien entendu, est interdit par notice, car cela n’a pas été étudié). L’administration transdermique est bien tolérée et bien pratique chez l’enfant, en évitant les écueils de la voie orale.32
Il nous arrive maintenant de renoncer à traiter, car il ne faut pas que le traitement soit pire que la maladie. Les mesures conservatives (gestion de l’environnement, habituation, prévention des besoins de base) peuvent être suffisantes.
Les autres médicaments.
Les antagonistes de la dopamine et de la sérotonine ont été étudiés dans la prévention du mal de mer, mais avec des résultats discutés. Les stimulants (amphétamines) ont surtout été étudiées dans l’industrie aéro-spatiale. Les neuroleptiques sédatifs, les glucocorticoïdes et les bloqueurs de canaux calciques pourraient avoir un effet, mais avec une balance bénéfice/risque défavorable.1 Par contre, on peut prescrire une préparation magistrale à base de Scopolamine 0.2mg, anti-histaminique de son choix et cafféine sèche pour contrebalancer l’effet sédatif. Cette préparation magistrale a l’avantage de combiner les avantages des molécules les plus efficaces et d’en réduire les effets secondaires. Les pharmaciens de la côte sont moins réticents à la préparer.






Le rangement
Le remède miracle n’existe pas, mais la combinaison de plusieurs stratégies peut améliorer les choses. Cependant, dans les moments difficiles, il est difficile d’aller chercher dans un coin le bracelet d’acupuncture, de l’autre de l’huile essentielle et ailleurs la playlist. Il est donc intéressant de regrouper tout le matériel « mal de mer » au même endroit, dans un équipet accessible facilement à tous les membres de l’équipage, malades ou non. Dans le même ordre d’idée, des tenues modulables adaptées à une météo changeante peuvent être préparées à l’avance, de même que la nourriture et les boissons. Lorsque tout est prêt pour éviter le mal de mer, préparons quand même le seau, disponible, et attaché à un bout pour pouvoir le rincer régulièrement : on ne sait jamais.
Avoir tout bien rangé au même endroit et facilement disponible n’est pas en soi une mesure anti-mal de mer. Le contraire par contre peut vite tourner au cauchemard, et rendre malades les équipiers qui cherchent à venir en aide au plus fragile. Penser à tout est un défi. Par exemple, avant notre départ, habituée à la vie sédentaire, j’avais pris soin d’emporter du linge de lit en suffisance, avec des motifs floraux et agréables, en pensant que sur la mer, la verdure nous manquerait certainement. En voyage, comme les jours de lessive sont habituellement des jours de grand soleil, nous n’utilisons pas le linge de rechange : les draps lavés le matin et séchés en journée sont directement remis sur leurs lits respectifs. Au vu des paysages magnifiques de la côte atlantique de l’Europe, la verdure ne manquait pas. J’avais donc conclu que j’avais emporté à tort beaucoup trop de linge de lit, et nos draps de rechange étaient rangés dans un coffre peu accessible depuis des semaines. Trois mois plus tard, à la faveur d’une traversée mouvementée, le seau arrivant une fraction de seconde trop tard, j’ai compris qu’on n’emporte jamais trop de linge de lit, et que celui-ci doit toujours être accessible facilement. En effet, accéder à des draps dans un coffre reculé est déjà pénible au port, mais devient épique dans la houle, le froid, le vent et l’obscurité. Désormais, le linge de rechange est toujours prêt, sous la main, et nous sommes équipés de plusieurs seaux. Après tout, nous préparons déjà le bateau (voiles, bouts, électricité, hublots, vannes, grab bag) avant le départ, ceci n’est qu’un équipet de plus.
Les proches
Comme pour n’importe quelle autre maladie, si on est indemne, il vaut mieux parler peu et écouter beaucoup. Au port, lorsque nous rencontrons un équipage sujet au mal de mer, évitons les affirmations culpabilisantes/angoissantes comme : « le mal de mer dure 3 jours » (si ça se trouve, notre interlocuteur malade navigue depuis des années, n’ajoutons pas à sa détresse) ou « Ce truc fonctionne à tous les coups » (si ça se trouve, notre interlocuteur malade l’a déjà essayé, et ce qui marche sur une certaine personne dans certaines circonstances ne s’applique pas toujours). Par contre, toute nouvelle idée est bonne à prendre, si elle s’intègre à la longue liste des stratégies déjà en place. En mer, laissons la personne malade choisir sa position, ses vêtements, sa nourriture. Il est tentant de vouloir aider à tout prix, de partager ses propres astuces, mais la position qui convient à l’un, sous certaines conditions de vent, ne conviendra pas à tous, de même que l’habillement, les goûts alimentaires et le reste. N’insistons pas. Ne posons pas non plus trop de questions (s’inquiéter est certes bien intentionné, mais il est possible que votre interlocuteur serre les dents : le forcer à parler risque de vous arroser de vomi). Dans le même ordre d’idée, acceptons les phrases brèves et n’exigeons pas la politesse (crier « seau ! » n’a rien de malpoli. Les formules de politesse pourraient retarder l’arrivée du seau et nécessiter un nettoyage malvenu. Notre plus jeune équipière nous le répète : « Chaque seconde qui passe est déjà un exploit », inutile d’accumuler les questions.


Enfin, pensons à assurer la sécurité de l’équipier malade : il n’a plus tous ses réflexes. Veillons à son harnais, en particulier s’il lui venait l’idée de se reposer à la plage avant (si la mer le permet, ce qui est rare) ou de vomir par dessus bord. Le mal de mer est désagréable, mais un équipier à la mer a des conséquences autrement plus graves et irréversibles. Depuis la nuit des temps on raconte des histoires de marins qui se sont jetés à la mer à l’appel de séduisantes sirènes.33 Il s’agit probablement d’une interprétation poétique du mal de mer, qui pousse les marins à se jeter à l’eau et ne jamais revenir.

Références
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