En longeant les côtes atlantiques de l’Europe, notre voyage a débuté vers l’Ouest et se poursuit vers le Sud. Arriver à la voile, c’est mesurer la distance, de tous ses muscles et de tous ses pores. A l’arrivée, les sens sont en alerte ; les yeux, les oreilles, la peau, le nez, les papilles sont prêts à s’émerveiller. Les meilleurs moments d’une vie surgissent lorsque le corps et l’esprit s’étirent à leurs limites, avec la fierté de l’accomplissement. Que dire alors d’une arrivée dans une ville comme Porto ou Lisbonne ? Les yeux, les oreilles, les papilles sont sursaturés devant ces enchevêtrements de façades dentelées, ces entrelacs de joyaux, ce dédale d’enchantements, d’azulejos colorés et de bacalhau parfumée. Des sonorités, des saveurs, des monuments transpirent des racines européennes, atlantiques, arabes, méditerranéennes. Nous arpentons les ruelles pavées escarpées en retenant notre souffle et en plissant les yeux, éboulis. La foule de badauds contraste soudain avec notre équipage réduit et des plages désertes. Ce ne sont plus les vagues qui déferlent ici, mais la marée humaine. Nous en avions perdus l’habitude.
Notre escapade vers le Sud est à présent plus régulièrement freinée par des dépressions qui nous poussent à l’abri des ports. L’arrivée de l’automne d’une part nous motive à fuir vers le Sud, mais d’autre part freine notre migration. Nous devons nous rendre à l’évidence : lorsque les éléments ne nous permettent plus d’avancer, il est peut-être temps d’en prendre son parti et de nous accorder des vacances bienvenues. Nous nous étions lancés dans le voyage en juillet, sans prendre le temps d’une pause : la pause nous rattrape. Nous nous sentions vulnérables et peu protégés à la marina Douro de Porto, mais cet abri de fortune est propice aux nouvelles rencontres, tous les équipages étant soumis aux mêmes conditions. les villes de Porto et Lisbonne nous ont émerveillés. Toutes les familles autour de nous révisent leur plans de voyage et ré-évaluent leurs possibilités.
Après cette longue pause, dès que la fenêtre météo s’ouvre, nous mettons cap vers le Sud. Nazaré est un port calme, chaleureux et bien abrité que nous partageons même avec des dauphins. Nous le quittons à regrets, mais craignant de gaspiller la moindre miette de vent favorable. Cascais offre une autre ambiance, plus balnéaire et moins familiale. Avec les autres équipages en voyage, nous guettons la prochaine fenêtre météo vers les îles de l’Atlantique. Cette fois-ci nous sentons que l’attente sera moins longue. Les vacances touchent à leur fin ; le voyage va bientôt reprendre.



