Nous avons choisi l’île de Lanzarote comme point d’atterrissage dans l’archipel des Canaires, simplement car il s’agit de l’île la plus nord-est où il est possible « d’atterrir ». L’île de la Graciosa était une autre possibilité, mais il semble qu’elle ne constitue pas un point d’entrée « officiel » dans l’archipel. Le choix de Playa blanca et de la marina Rubicon, située au sud de l’île, était opportuniste. Les marinas sont pleines et nous sommes allés à un des seuls endroits où nous avons pu trouver une place.
Après notre arrivée, nous prenons deux jours assez calmes. Nous ne sortons pas franchement du complexe de la marina. Nous en profitons pour ranger un peu et nettoyer le bateau, faire une bonne lessive et nous reposer. Nous planifions aussi les visites sur l’île.
Nous optons pour des visites organisées en car parce que le réseau de bus est assez peu développé sur l’île et que nous ne sommes pas franchement tentés par la location d’une voiture. La première excursion que nous réalisons nous emmène dans la réserve naturelle de Timanfaya dont le nom n’est autre que celui d’un des principaux volcans qui la constitue. En plus de nous guider à travers ces immenses champs de lave, notre guide nous explique combien la vie sur l’île était difficile et précaire avant l’essor du tourisme. En effet, en raison de la relativement basse altitude de ses volcans, Lanzarote est l’île sur laquelle il pleut le moins. Cette carence permanente en eau douce a façonné l’habitat et l’agriculture sur l’île d’une façon encore bien visible aujourd’hui, malgré l’avènement des centrales de désalinisation.




Un second tour nous emmène à travers l’île sur les pas de l’œuvre et de la vie de l’artiste Cesar Manrique, un artiste éclectique originaire de Lanzarote qui, en plus de ses créations, a œuvré pour le développement d’un urbanisme et d’un tourisme raisonné sur l’île. Nous visitons et observons, entre autres, le monument à l’agriculture, la maison de l’artiste, le mirador et le jardin des Cactus.





Après une petite dizaine de jours passés à Lanzarote, il est temps de poursuivre notre chemin. C’est à peine croyable, mais une dépression doit passer sur l’archipel et amener des vents du secteur sud modérés à assez fort. Il faut donc que nous trouvions un abri et ce, d’autant plus que malgré nos demandes, la marina Rubicon n’est pas en mesure de prolonger notre séjour. Nous décidons donc de mettre le cap sur le port de Las Palma à Gran Canaria. Malheureusement, ce port n’accepte pas les réservations pour les particuliers et nous savons dès le départ que nous devrons passer quelques jours à l’ancre avant d’obtenir une place. Nous profitons d’une nuit où le vent est établi au secteur nord à nord-oust pour quitter Lanzarote. La première heure trente de navigation est agréable. Ensuite, le vent change brutalement de direction pour s’orienter à l’ouest. Nous devons tirer des bords, c’est à dire faire des zigzags autour de la direction du vent pour avancer. Le vent change sans cesse de force et de direction, rendant notre progression presque inexistante. Nous nous posons même la question de faire demi-tour. A l’AIS nous apercevons le voilier « Twenty » avec qui nous avions fait connaissance à Cascais, quelques miles devant nous. Alors qu’il semblait éprouver les mêmes difficultés de route que nous, il change de cap pour se mettre en route directe. Je le contacte à la radio m’informer des conditions de vent et de mer qu’il rencontre. Il me confirme avoir connu exactement les mêmes difficultés que nous mais en sortir. L’association d’un grain orageux et de l’effet du relief des îles dévie le vent localement. Nous tenons bon encore quelques miles au prés serré avant de pouvoir mettre le cap directement sur Gran Canaria. Sans les informations communiquées par Sébastien, skipper de Twenty, nous aurions peut-être rebroussé chemin. Nous naviguons jusqu’à Gran Canaria avec le vent et la houle de travers, ce qui n’est pas franchement confortable. Nous arrivons sur le mouillage vers 12h00 où nous sommes accueillis et assistés dans la recherche d’un place par l’équipage de Morphéus. Le mouillage est bondé. Nous ancrons à proximité de Morphéus mais je ne suis pas confortable car je trouve que nous sommes trop près des autres bateaux. Nous changeons donc de place dans l’après-midi, mais le lendemain matin, le personnel du port nous somme de « dégager » dès la première heure, estimant que nous sommes trop proches du chenal. Nous retournons vers l’arrière du mouillage et ré-ancrons dans un trou souris. Il faudra que nous nous habituions à ce peu de distance entre les bateaux et au fait de ne pas pouvoir étaler autant de chaîne que nous le souhaiterions.
L’arrivée à Gran Canaria est aussi pour nous l’occasion de faire le bilan des premiers mois de voyage et de planifier la suite. Nous sommes heureux d’avoir pris la décision de faire ce break et de passer cette année en famille. Le voilier est un vecteur formidable pour le voyage et Lady Mi remplit parfaitement la mission. Par contre, force est de constater que la descente de la côte portugaise et la traversée vers les Canaries ont été difficiles, pour nous comme pour la plupart des équipages que nous avons croisés. La cause principale de cette difficulté est la météo, la côte portugaise ayant été littéralement bombardée de dépressions qui ont amené du vent de sud-ouest et de sud ainsi qu’une forte houle. Les navigations sont donc devenues presque toujours plus difficiles depuis notre arrivée sur les côtes du nord de l’Espagne. L’instabilité semble persister à ce jour et les conséquences des dépression sur l’état de la mer se font sentir bien en deçà de la latitude des Canaries. Afin que la navigation re-devienne un plaisir pour tout l’équipage et de façon à pouvoir rencontrer notre objectif initial qui est de passer du temps en famille, dans une ambiance qualitative, nous envisageons donc de renoncer à la traversée de l’atlantique au profit d’une exploration plus posée et approfondie des archipels des Canaries, de Madère, des Açores et puis d’un retour via l’Irlande à la fin du printemps prochain.